Les Gouvernements en Belgique francophone sont désormais en place. Le décryptage des Déclarations de politique régionale apporte un éclairage intéressant sur la manière dont les politiques, de près ou de loin, s’emparent de la question des aidants proches… Tour d’horizon …
En Région de Bruxelles-Capitale
De manière transversale, le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale plaide pour un décloisonnement des institutions bruxelloises (qui forment un kaléidoscope de compétences, de niveaux de pouvoirs, de décision…) en vue de renforcer des axes majeurs tels que la cohésion sociale, la santé, le social…
Bruxelles encourage de fait, la réduction des inégalités sociales, par une meilleure organisation des soins et de l’action sociale. Cet enjeu est un point central pour les aidants, qui veulent aussi se voir associer aux décisions les concernant. Cette participation est inscrite en toutes lettres dans la « perspective globale » du politique : face aux personnes en perte d’autonomie, le politique encourage une « approche globale des besoins de la personne (…) (intégrer l’aide, le soin, le lien), ainsi que la prise en compte des aidants proches, des voisins, des « pairs aidants », etc. »
Plus globalement, les aidants qui aimeraient faire entendre leur expertise, seront heureux d’apprendre que les politiques bruxellois sont eux-mêmes désireux d’établir une démarche associant les citoyens aux réflexions et aux décisions, les concernant.
Cette même participation se retrouve dans le souhait de Bruxelles, d’une réponse globale aux besoins des personnes en perte d’autonomie. La Région plaide pour un modèle intégré d’aide et de soins, réponse face à une population vulnérable dont la précarité sociale majore les difficultés de santé. Cette réponse implique la concertation des patients mais aussi de leur entourage. Par ces leviers, les politiques bruxellois entendent lutter contre des écueils connus, sur leur territoire : la précarité sociale, synonyme de non-recours aux droits. C’est pourquoi la Région entend développer des systèmes tels que la « pair-aidance », qui pourrait être un levier mobilisable également pour les AP (par « pair-aidance », on entend le soutien par des pairs « aidants » qui vivent ou ont vécu des difficultés similaires, d’autres aidants).
Figure dans la Déclaration l’idée que les professionnels de 1° et de 2° lignes d’aide et de soins doivent se mobiliser pour le soutien aux AP, à travers un « accompagnement dans leur bien-être et le développement d‘un répit ». Une attention particulière touche les « jeunes AP », qui doivent bénéficier d’un accompagnement spécifique incluant les écoles et les délégués aux droits généraux des enfants des Communautés.
En Wallonie
Une attention en toutes lettres, aux « aidants proches » :
Le Gouvernement se propose de renforcer les offres de répit d’une part (ex. : convalescence ou court séjour, pour la dyade aidant-aidé) mais aussi, de faciliter leur accès à l’information, aux aides et à un accompagnement psychosocial. L’asbl lance donc un appel sans équivoque aux politiques : ces missions, elle les remplit déjà, depuis son siège ou via ses antennes. Mais pour poursuivre et amplifier son action, un agrément et un financement pérennes, sont plus qu’urgents !
Dans le domaine de l’emploi :
- Le 1° focus du Gouvernement réside dans la valorisation des compétences. Ce point rejoint l’un des axes du mémorandum de l’asbl, soit l’idée selon laquelle les aidants développent une expertise et des savoirs, qui peuvent être un tremplin à leur éventuel retour dans la vie active.
- Si l’asbl salue la volonté politique en Wallonie, de soutenir la conciliation entre emploi et vie active, elle rappelle la diversité de profils des aidants, qui ne sont pas uniquement des parents de jeunes enfants. Encourager une démarche « parents friendly» du secteur de l’emploi oui, mais soyons ambitieux ! et tablons sur des entreprises, des bassins d’emplois « aidants proches friendly » !
Dans le domaine de la santé :
- Du point de vue de la santé, le Gouvernement wallon veut tout à la fois favoriser l’accès à la santé pour tous et garantir une politique cohérente entre les domaines de l’aide, des soins et du soutien social. L’enjeu est de permettre une meilleure offre de soins, notamment dans les zones en pénurie de professionnels de santé (médecins…) et par une réflexion sur les métiers « de 1 ° ligne », encouragés à déployer des passerelles avec les secteurs spécialisés tels que les hôpitaux par exemple.
- Tout cela représente une belle opportunité d’insérer les acteurs « invisibles » de cette équation, les AP, dans cette réflexion sur la politique sociale et de santé wallonne. Et tout particulièrement, dans l’attention portée à leur propre santé, car les axes de promotion et de prévention, figureront en bonne place dans la réflexion sur la santé.
- L’asbl reste attentive à la place qui sera donnée aux AP dans ce qui relève de « la participation des citoyens-patients» : qu’il s’agisse du partage des données numériques (via le réseau santé wallon), la sensibilisation des (futurs) professionnels à la réalité des patients, dans la concertation pour la politique de santé, l’asbl veillera à faire entendre la voix des AP.
- En effet, les mesures annoncées par le Gouvernement wallon, en ce qui concerne les personnes handicapées, pourraient clairement être des axes qui valent aussi pour l’aidance : accompagnement en vue d’apporter une réponse spécifique, quel que soit le domaine, fonction consultative représentant ce public-cible sont des axes majeurs.
- Si le Gouvernement se propose une « véritable évaluation des besoins des personnes en perte d’autonomie », dans les divers aspects de leur vie, il doit y associer également leurs proches, surtout si sa volonté est de prioriser le maintien à domicile. L’asbl salue la volonté de renforcer les métiers de l’aide. Néanmoins, elle insiste fortement sur le fait que, plus que la seule réponse par des aides professionnelles, la qualité du partenariat entre aidants proches et professionnels est le moteur de la qualité de vie des personnes en perte d’autonomie, quel que soit leur lieu de vie…
Dans le domaine social :
- La volonté du Gouvernement wallon de réduire les inégalités, « veiller à l’intégration sociale et à la participation des personnes plus précarisées en tant que force sociale à part entière» éveille l’attention de l’asbl : lutter contre les discriminations multiples, soutenir l’effort dans le domaine de la mobilité, faciliter l’accès aux soins de santé, aux droits sociaux (en ce compris, par une automatisation des procédures) ne peut que rencontrer les soucis quotidiens des AP.
- Le Gouvernement se veut pleinement acteur dans le domaine de la cohésion sociale. C’est la raison pour laquelle il insiste, pour ce qui est de la démocratie et de la citoyenneté, sur la notion de « dynamique participative [et/ou] locales». Deux pistes paraissent prometteuses pour les AP : l’instauration, dans les communes, de commissions délibératives et de conseils consultatifs thématiques. La solidarité informelle étant bel et bien le socle de l’accompagnement aux personnes fragilisées, il est donc essentiel que ce « vivre ensemble » s’enracine dans la proximité des pouvoirs publics locaux et visibilise les « aidants » autres que familiaux (voisins, connaissances…). C’est ce lien vivant de solidarité qui demande à être restauré, vivifié. C’est en tout cas, le pari de la Wallonie pour ce qui est de son plan de « transition sociale ».